Quoi de plus naturel que de se remettre régulièrement en question ? Cela semble évident mais ce n’est pas toujours une qualité naturelle et intrinsèque des individus ; de plus, le faire en solitaire présente des limites.
Depuis quand avez-vous participé à un séminaire qui vous a remués dans vos certitudes, dans votre approche ?

C’est l’ambition des séminaires de préventeurs que j’ai pu animer, notamment ces derniers mois : aider les préventeurs à une prise de recul, à un questionnement, à une réflexion autour de leurs certitudes et de leurs croyances pour les faire évoluer.
Le principe est de permettre à chacun de s’améliorer en prenant de la hauteur. Les préventeurs sont souvent embarqués dans une frénésie d’actions, de reporting. Je constate que chacun a remodelé son poste en fonction de l’appétence qu’il avait pour tel ou tel type d’activité. Lorsque j’interviens dans un même groupe, je suis parfois surpris de constater que les actions quotidiennes des divers préventeurs – assurant a priori le même poste – sont assez éloignées.
Les préventeurs ont généralement beaucoup d’autonomie. Cela représente, bien entendu, une richesse pour l’entreprise mais cela peut aussi devenir un piège tant chacun adapte son poste et, finalement, l’efficacité attendue n’est plus au rendez-vous.

 

Les écueils à éviter

Voici les écueils que je croise le plus fréquemment et dans lesquels il ne faut surtout pas tomber :

  • Un préventeur qui a choisi ce métier pour faire en sorte qu’il y ait moins d’accident mais qui, en fin de compte, passe sa journée à répondre à des obligations règlementaires.

  • Un préventeur qui n’est sur le terrain qu’une fois par semaine, au mieux.

  • Un préventeur qui a pour cible directe les salariés au lieu d’accompagner les managers.

  • Un préventeur qui a mis en place des systèmes, des actions, des principes sans savoir comment cela est concrètement déployé.

  • Un préventeur qui donne des solutions sans chercher à comprendre la problématique, la vision de l’autre, les êtres humains face à lui.

  • Un préventeur qui n’est pas très clair sur ce qui est attendu de chaque niveau hiérarchique.

  • Un préventeur qui ne connaît pas très bien son système de management de la prévention.

Pour toutes ces raisons, je vous encourage à vous réunir et à remettre en question vos pratiques, vos méthodes, vos certitudes.

Le préventeur, un chef d’orchestre

Lors des séminaires de préventeurs, mon rôle n’est pas d’axer sur la technique. En général, sur cet aspect, les préventeurs sont très performants.
En revanche, je me rends compte qu’ils ont souvent oublié que leur rôle principal était celui de « chef d’orchestre » faisant exécuter une partition de prévention par les managers. Cette partition de prévention, c’est tout le système de management.
Or, parfois, ce chef d’orchestre ne connaît pas bien sa partition. Dans ce cas, comment pourrait-il aider les musiciens – alias les managers – à jouer correctement s’il ne sait pas les notes que chacun doit jouer ?

Se remettre en question

Je vous conseille donc de prendre du recul afin d’analyser les actions menées par chaque niveau hiérarchique. C’est un exercice très intéressant à mettre en place.
Une fois que cela a été précisé, il convient de s’interroger sur la manière dont ces actions sont réalisées, sur la méthodologie, la durée, le rythme, les outils utilisés, etc.
Parfois, je questionne simplement les préventeurs d’une même entité par : « qui fait quoi ? » puis je leur demande de définir clairement la méthodologie mise en place pour que chaque action soit efficace. Or, je m’aperçois que les réponses diffèrent d’un préventeur à l’autre.
Force est de constater que les préventeurs se rendent compte d’eux-mêmes que, petit-à-petit, ils ont délaissé ce rôle de chef d’orchestre ; ils ont un peu oublié la partition et les managers-musiciens ne se sont pas fait prier pour jouer moins vite, moins fort et de manière moins coordonnée… Parfois, certains ont même posé leurs instruments et ne jouent plus du tout !

Les séminaires de préventeurs

Alors, les préventeurs se remobilisent sur leur cible principale qui est et doit être l’accompagnement, l’aide et le soutien des managers. Ainsi, les séminaires de préventeurs permettent d’aligner les méthodes, les pratiques, les systèmes de management et la définition des actions. Ils permettent de recentrer les priorités attendues de chacun.

Je vous conseille aussi de ne pas oublier une autre valeur ajoutée : la cohésion d’équipe, le soutien et l’entraide du réseau de préventeurs. Le préventeur est souvent seul dans son périmètre ; il a besoin de soutien technique et parfois personnel.

Ce sont les raisons pour lesquelles je vous encourage vraiment à organiser des séminaires de préventeurs de deux ou trois jours, chaque année.

TÉMOIGNAGE

 » Koné a un taux de fréquence d’accidents inférieur à 2, ce qui est très bon pour la profession mais ce qui nous oblige, par conséquent, à être encore plus attentifs dans notre remise en question pour avancer. Dans toute démarche d’amélioration continue, le modèle doit être sans cesse revu et c’est pourquoi l’apport d’un intervenant extérieur est très enrichissant.
Nous avions beaucoup progressé en suivant un modèle pendant 10 ans mais nous voulions faire mieux. La première prise de conscience devait être celle de mon équipe. Il y avait un déclic à générer : étions-nous capables de remettre en question notre modèle ?
Le premier jour, la prise de conscience s’est effectuée avec le jeu de la stratégie. Nos visions étaient très différentes, avec un écart important. Notre équipe s’est alors dit : « on n’est pas clair, on doit avancer ». Il est intéressant de constater qu’en une journée, chacun était prêt à se remettre en question pour changer et progresser.
Grâce aux deux autres journées du séminaire, est arrivée la prise de conscience du modèle et les clés permettant de le faire évoluer. Le positionnement des préventeurs comme chefs d’orchestre du modèle a apporté un éclairage pertinent sur la manière de rendre nos missions beaucoup plus efficaces.
Ensuite, une série de déclics a permis à chacun de progresser. Je peux citer quelques points qui nous ont marqués :
➢ transformer les visites sécurité qui étaient plus des check-lists et des contrôles que de véritables visites de progression individuelles ;
➢ mettre en place des mécanismes de coaching entre les managers.
Nous avons pris conscience du fait que notre approche était parfois infantilisante pour nos salariés. Pour nous bousculer, Fabrice Reboullet, nous a interpellés : « arrêtez de prendre vos salariés pour des idiots ! ». C’est finalement ce qui se passait, malgré nous, à cause de méthodes trop descendantes.
• Sur les causeries (ou ¼ d’heure sécurité) : nous avons découvert que la participation était accessible à tous si les managers y étaient préparés. Nous avons constaté que des approches ludiques et différentes pouvaient se mettre en place. Nous avons testé des techniques d’engagement qui n’existaient quasiment pas chez nous.
• Sur l’efficacité des actions : nous étions trop axés sur la quantité et pas assez sur la qualité, tant de celle des actions managériales que de celle des actions de nos plans d’actions. Inutile d’avoir 10 lignes de plan d’actions si seulement 5 sont nécessaires ! C’est comme si nous avions eu, jusque-là, beaucoup d’ingrédients mais pas assemblés dans le bon sens. C’est pourquoi nous avons travaillé sur l’efficacité, l’impact, sans oublier de mettre des « étincelles ».
L’intervention de Fabrice Reboullet nous a beaucoup apporté car nous avons remis l’humain au coeur de notre système. Nous avons osé repenser notre système pour qu’il soit plus adapté à chacun. Il est également intéressant de voir que cela apporte des fruits dans notre approche globale. Par exemple, après le séminaire, lors de la préparation de notre semaine de la sécurité, nous avons réfléchi différemment ; nous avons décidé d’intégrer plus de ludisme, plus de participation et donc plus d’efficacité. Les résultats et le changement sont là. « 

Lionel BOURSON
SQE Director chez KONÉ FRANCE

Retrouvez l'ensemble de notre actualité sur notre page LinkedIn, Graphito Prévention