Dans chaque entreprise, quelques salariés sont régulièrement victimes d’accidents. On les nomme : les poly-accidentés. L’objectif du préventeur est de protéger au mieux ces personnes qui, pour différentes raisons, subissent et vivent ces situations d’accident.

Comment définir un poly-accidenté ?

Bien entendu, pour parler de poly-accidentés, il faut un volume conséquent de salariés comme base d’analyse. Les critères qui définissent le poly-accidenté peuvent varier d’une société à l’autre. Cela dépend déjà des informations dont on dispose.  Dispose-t-on d’informations relatives aux seuls accidents ou mesure-t-on les accidents bénins, les soins ?  On peut également utiliser des indicateurs complémentaires comme les constats routiers ou les infractions routières.

Dans le cadre de l’ensemble des diagnostics réalisés pendant 5 ans auprès de sociétés aux activités variées, nous retrouvons les statistiques suivantes :

– Environ 20 % des personnes ayant eu un accident l’année N ont déjà eu un accident en N-1 ou N-2.

– Par ailleurs, au cours d’une période de 10 ans, environ 5% des personnes représentent 15 % des accidents du travail.

Une responsabilité individuelle ?

La première source de poly-accidentés reste :

– soit l’activité propre, donc une activité identifiée comme à risque ;

-soit la culture spécifique d’une activité, d’un secteur, d’une entité, c’est-à-dire liée à une problématique de management.

Dans ces deux cas, le poly-accidenté concerné « subit » en grande partie la situation. L’action doit alors se porter vers le management concerné, la zone, l’activité et non sur les individus.

Vous aurez un indicateur fort de cet élément si, pour une même activité, zone ou périmètre managérial, vous retrouvez plusieurs poly-accidentés ou un pourcentage beaucoup plus élevé que dans vos autres entités.

Mais qui sont les poly-accidentés ?

Comme évoqué ci-dessus, vous avez donc des poly-accidentés liés à leur activité à risque (manutentions extrêmes, travaux difficiles…) ou à un management prévention défaillant (productivité excessive, pression du client, agressions permanentes…).

Ces poly-accidentés le sont donc  non de par leur profil mais de par le contexte de travail. L’action à mener doit se centrer sur l’activité de ces salariés.

Toutefois, une fois ces situations mises de côté, vous découvrirez d’autres poly-accidentés ; nous en avons identifié quatre grands types :

-Les poly-accidentés de complaisance. On évoque souvent les « accidents de complaisance » dans les directions. Il est vrai que cela existe et qu’il ne faut pas le nier. Et justement, les profils qui « en profitent » se font en général remarquer par cette notion de répétition d’accidents.

-Les poly-accidentés ayant une déficience physiologique ou psychique : mauvaise vue, difficultés physiques… générant régulièrement des chocs, des chutes ou d’autres problèmes, tant dans leur vie personnelle que dans leur vie professionnelle.

-Les poly-accidentés « casse coup» : le profil des personnes qui aiment le risque, qui n’ont peur de rien, qui se donnent sans compter et sans limite. Il leur arrive régulièrement des accidents.

– Les poly-accidentés « distraits » : on a affaire ici à des profils de personnes étant particulièrement inattentifs. On me parle souvent de Pierre Richard. Le malchanceux qui, en fait, ne porte pas une grande attention au monde qui l’entoure.

Chacun de ces profils peut progresser et la participation à un programme associant de la formation à de l’accompagnement personnalisé est extrêmement efficace. L’entreprise qui met en œuvre ce genre de programme affiche clairement une aide auprès de ces profils ciblés.

Comment lutter ?

Nous sommes beaucoup consultés par des directions et des préventeurs qui nous demandent un accompagnement sur ce sujet. En général, le souhait se porte vers des message-chocs afin de recadrer de façon stricte (voire autoritaire) les salariés concernés.

Mais une approche trop brutale va assurément générer un mécanisme de défense et de rejet, d’opposition plutôt qu’un mécanisme d’ouverture. Si nous voulons avoir de l’efficacité à long terme, nous préférons développer la prise de conscience positive et individuelle, l’envie de progresser et de mieux se préserver. Ainsi, la convocation à cette formation est déjà en soi une situation particulière. Et il n’est pas utile d’ajouter de « grands coups de bâtons » pour que les personnes aient conscience qu’elles sont dans une situation identifiée et spéciale.

Quelles sont les clefs d’un accompagnement réussi ?

La formation ne doit surtout pas être descendante. Il est important de travailler en pédagogie active et participative. Cela veut donc dire que les stagiaires vont s’auto-analyser, se confronter à des situations, imaginer les différentes réactions possibles ; ils sont acteurs de la formation en permanence.

Le principe n’est pas de les convaincre mais bien qu’ils puissent se convaincre par eux-mêmes.

Il s’agit également de les aider à grandir dans leur « compétence sécurité ». Nous avons constaté que ces profils n’accordaient en général qu’une très faible attention à la sécurité car, à leurs yeux, la fatalité était à l’origine de leur situation. Des phrases comme : « on ne peut pas travailler sans avoir d’accident » ou « ce sont des accidents bêtes » montrent la nécessité de décortiquer les mécanismes qui mènent à l’accident.

Ainsi, forts de ces apprentissages, ils repartent à leurs activités avec des missions de progression à réaliser. Ils imaginent leur propre plan d’action individuel permettant de progresser. Durant cette phase, ils sont accompagnés. Puis deux ou trois mois plus tard, ils reviennent présenter leurs actions et leur évolution.

Cet accompagnement est assez formidable car il permet à des salariés généralement fermés et opposés à la sécurité de s’ouvrir et de se révéler. L’accueil méfiant se transforme au fil du temps en une force et une volonté de se préserver. Ces profils souhaitent même faire profiter leurs collègues de ces accompagnements et repartent avec les moyens de le faire.

Les changements individuels observés sont spectaculaires. Cela prouve que l’intérêt profond et bienveillant porté aux individus apporte toujours de merveilleux résultats.

SUR LE TERRAIN

«NOUS AVONS MIS EN PLACE UN
ACCOMPAGNEMENT POUR
SENSIBILISER NOS COLLABORATEURS.»

Yannick Beneba, responsable  prévention
Veolia Eau, secteur Ile-de-France

« Suite à une étude réalisée sur l’accidentologie au sein de notre société, nous avons constaté que certains de nos collaborateurs étaient confrontés régulièrement à des accidents de travail : les poly-accidentés. Face à ce sujet constat, nous souhaitions mettre en place un accompagnement pour sensibiliser ces collaborateurs. Nous avons opté pour un coaching que nous avons co-construit avec Graphito. Les participants ont été informés au préalable de ce coaching mais tous étaient très réticents et y sont allés à reculons. La première journée sur site et les entretiens téléphoniques ont permis aux participants de s’exprimer sur les problématiques qu’ils pouvaient rencontrer mais également de s’auto-évaluer sur les actions qui les ont menés à l’accident. Chaque participant a alors construit un plan d’action, des engagements à respecter pour progresser sur sa propre sécurité. La seconde journée sur site, 3 à 4 mois après la première, a invité les participants à faire un retour d’expérience sur ce coaching, sur la prise de conscience de leur mise en danger et à faire part de leurs engagements pour le futur. Les résultats sont encourageants : seulement quelques mois après la fin de l’accompagnement, nous constatons déjà une baisse du pourcentage des accidents de personnes poly-accidentés sur le global des accidents de la société. Face au succès de l’accompagnement proposé aux personnes poly-accidentés, Veolia Eau France a recommandé son déploiement sur l’ensemble du groupe. »

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